Toutes celles et ceux qui ont eu à mener un projet de réorganisation, impliquant des modifications dans les espaces de travail, savent combien il est important de porter toute l’attention nécessaire à toutes ces étapes du projet.
Les collectivités territoriales doivent faire face comme le secteur privé, à la fois à des recherches de rationalisations des mètres carrés, qui se traduisent, notamment avec les fusions de collectivités, par des déménagements qui sont l’occasion de repenser la distribution des bureaux, leur usage, en tenant compte des nouvelles technologies et des évolutions de la société, usages partagés, nomadisme. toutes ces approches intéressent aujourd’hui les managers et les DRH.
Manager les espaces de travail ne s’improvise pas !
De nombreuses collectivités tentent l’expérience, en proposant ni plus ni moins qu’une révolution de leur organisation fondée sur les nouveaux espaces de travail, c’est en tous les cas la promesse que font certains employeurs territoriaux, parmi lesquels, le Conseil Régional d’Ile de France, qui n’a pas hésité à adopter les grands principes issus du secteur privé en s’inspirant notamment directement du modèle de l’opérateur de téléphonie Orange.
Dans un article publié sur le blog Apprendre Autrement, Denis CRISTOL, Directeur de l’Ingénierie des formations au CNFPT propose un état des lieux très précis du processus de transformation engagé par la Région Ile de France, articulant nouveaux espaces de travail et nouveau modèle managérial.
Dans un autre article, publié dans la Harvard Business Review, l’auteur, architecte, Philippe CHIAMBARETTA, explique comment faire des bureaux, un enjeu managérial. Pour cela, il donne quelques conseils : favoriser l’horizontalité dès que c’est possible, pour faire travailler ensemble les équipes, créer des lieux de rencontres ouverts à tous, favoriser la transparence (fini les bureaux opaques qui ne favorisent ni la confiance, ni les échanges!), donner plusieurs usages à un même lieu, créer des espaces de sociabilité, y compris en utilisant des espaces extérieurs.
Cet article bouscule bien des idées reçues sur l’organisation des bureaux, ses préconisations sont assez éloignées de ce que l’on trouve encore dans nos organisations, très hiérarchiques, l’agencement et la distribution des bureaux est encore largement le reflet des lieux de pouvoir et c’est bien dommage !
Dans une vidéo de quelques minutes, Isabelle BARTH, Directrice de l’INSEEC Business School, s’intéresse à l’anthropologie et aux travaux de Claude LEVI STRAUSS sur une tribu brésilienne, les Bororos, pour comprendre l’impact des changements de bureaux sur les personnes, tout en regrettant le manque d’intérêt des managers pour ces questions.
Elle y démontre que les postures de résistance au changement de bureaux sont simplement liées aux attributs du bureau, qui ne sont pas neutres et reflètent par exemple la reconnaissance que l’organisation accorde à son collaborateur, un symbole, un statut ; tout cela doit donc être pris en compte, il en va de la qualité de vie au travail. La disposition physique des espaces de travail, va avoir un impact sur les comportements, elle est même le reflet selon les travaux de l’anthropologue, de l’organisation sociale d’un groupe, et par extension de toute l’organisation.
On en déduit donc que tout projet de changement des espaces va avoir un impact sur toute l’organisation sociale du groupe, provoquant désorientations, pertes de repères, qui peuvent s’accompagner de vraies difficultés d’adaptation, s’il n’y a pas un accompagnement important.
Ces contributions montrent combien les managers doivent être attentifs à ces questions de gestion des espaces de travail et des bureaux.
Les managers territoriaux sont également confrontés à un autre défi, celui du travail à distance ou télétravail et dans ce domaine, le moins que l’on puisse dire c’est que les évolutions restent encore assez limitées !
Dans un rapport qui vient d’être rendu public la DGAFP dresse en effet un premier bilan de la mise en œuvre du télétravail dans les trois versants de la fonction publique, à travers un travail d’enquêtes qui s’est déroulé à l’automne dernier dans plusieurs administrations.
Et le constat est mitigé si l’on en croit les quelques articles parus sur le sujet, notamment celui publié sur le site de BFM TV, qui revient sur les avantages mis en avant dans les expériences de télétravail, meilleure efficacité, moindre fatigue, donc un intérêt marqué chez les agents qui le pratiquent.
Mais il semble que du côté des employeurs, et de l’encadrement l’enthousiasme n’est pas au rendez-vous, ce qui expliquerait ce bilan jugé mitigé, même si nous voyons tous autour de nous, des expériences se généraliser, notamment dans les collectivités territoriales les plus importantes, mais souvent ce sont des collectivités qui avaient déjà commencé des expérimentations depuis plusieurs années.
Le rapport présente notamment les conditions de réussite du déploiement du télétravail, qui passent par des règles formalisées et partagées.
Les employeurs mettent en évidence les contraintes techniques, le manque de souplesse dans l’application du décret du 11 février 2016, qui fixe de façon assez précise les modalités à respecter.
Du point de vue du management, la question est abordée dans le rapport, mais de façon assez sibylline finalement. Il en ressort, qu’il est sans doute encore nécessaire de mieux former les encadrants aux enjeux du télétravail, qui n’est finalement qu’un outil au service de nouvelles pratiques managériales, qui interrogent le métier de manager,son rôle vis-à-vis des équipes, ses capacités d’animation et de leadership, la fixation des objectifs au sein des équipes, l’évaluation des résultats et enfin, et ce n’est pas anodin, les relations de confiance au sein d’une équipe et plus largement de toute l’organisation, ce qui implique de la pédagogie et de partager une culture commune sur les questions d’autonomie et de responsabilité, ce qui est très loin d’être le cas.
Que ce soit dans l’aménagement des espaces de travail, ou dans le développement du travail à distance, le management public territorial doit s’adapter aux nouvelles formes de travail qui se développent dans tous les secteurs, une révolution est en cours, qui impose d’abord une révolution de la culture professionnelle!.