Petit résumé de la publication de la revue Essentiel du CIG de la Grande Couronne, rédigé en collaboration avec Pierre-Yves Blanchard, DGA
Le CPF, nouvel outil RH
La loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, dite loi Travail, et l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ont instauré un nouvel outil, le compte personnel d’activité (CPA), destiné à favoriser l’évolution et la mobilité professionnelles. Une manière de tendre vers une harmonisation des législations secteur privé/secteur public.
Au sein de la Fonction Publique, le CPA comporte deux comptes : le compte engagement citoyen (CEC)et le compte personnel de formation (CPF).
Le CPF se substitue au droit individuel à la formation (DIF) abrogé par le décret n° 2017-928 du 6 mai 2017. Ce nouveau dispositif permet aux agents publics d’acquérir des droits à la formation au regard du temps de travail accompli. Les heures de formation ainsi acquises seront destinées à financer des prestations ayant pour objet de maintenir un niveau de qualification ou d’accéder à un niveau de qualification supérieur.
Un CPF « portable »
A destination de tous les fonctionnaires et contractuels en CDD ou CDI, sa portabilité permet aux agents de faire valoir auprès de toute personne publique ou privée qui l’emploie les droits acquis antérieurement, selon les modalités du régime dont il relève au moment de sa demande. Le CPA est accessible dans un espace dématérialisé commun aux salariés privés et publics, par rattachement à un système d’information déployé par la Caisse des dépôts et consignations sous le portail : moncompteactivité.gouv.fr
Renforcer l’employabilité des agents
Un peu comme en hygiène et sécurité, le CPA dépasse ainsi les droits du travail et de la fonction publique pour s’attacher à la personne du salarié et favoriser la mobilité entre n’importe quelle personne publique et entre secteurs publics et privés.
L’une des finalités intrinsèques du CPF est donc d’assurer le maintien de l’employabilité et la sécurisation des parcours professionnels. Les employeurs publics sont invités à développer les collaborations, tant au sein des différents versants de la fonction publique qu’entre eux, nouer des partenariats avec les universités et autres organismes de formation pour faciliter l’accès à l’offre de formation diplômante ou certifiante, notamment par la voie de la validation des acquis de l’expérience (VAE), renforcer la structuration de l’offre de formation en blocs de compétences et en parcours de formation, permettant de répondre au mieux aux besoins identifiés pour la construction des parcours professionnels des agents.
CPF, mode d’emploi
Le DIF ayant été abrogé, les employeurs doivent recenser le nombre total d’heures acquises au 31 décembre 2016 par les agents dont ils assurent la gestion au titre du DIF. Ce recensement tient compte des droits acquis par ces agents auprès de tout autre employeur de droit public. Ces heures sont ensuite transférées sur le CPF et les agents sont tenus informés avant le 31 décembre 2017 des heures inscrites sur leur CPF
Les agents publics peuvent faire valoir auprès de leur nouvel employeur les droits préalablement acquis auprès d’autres employeurs, publics ou privés.
A la différence du droit individuel à la formation, qui restait lié à des actions de formation continue ou à la préparation des concours et examens, l’utilisation du compte porte sur toute action de formation (hors celles relatives à l’adaptation aux fonctions exercées), ayant pour objet l’acquisition d’un diplôme, titre ou certificat de qualification professionnelle ou le développement des compétences nécessaires à la mise en œuvre du projet d’évolution professionnelle.
Le compte peut aussi être mobilisé en combinaison avec le congé de formation professionnelle et en complément des congés pour validation des acquis de l’expérience et pour bilan de compétences.
Il peut enfin être utilisé pour préparer des examens et concours administratifs, le cas échéant en articulation avec le compte épargne temps. En pratique, les droits acquis peuvent compléter une décharge accordée poursuivre une action de préparation aux concours et examens.
Le CPF est alimenté en heures de formation au 31 décembre de chaque année. En principe, l’alimentation du CPF s’effectue à hauteur de 24 heures maximum par année de travail jusqu’à l’acquisition d’un crédit de 120 heures. Ensuite, l’alimentation se fait à hauteur de 12 heures par année de travail dans la limite d’un plafond total de 150 heures. Par exception, l’alimentation du CPF se fait à hauteur de 48 heures maximum par an et le plafond de 150 heures est porté à 400 heures, pour le fonctionnaire qui appartient à un cadre d’emplois de catégorie C, ou l’agent qui occupe un emploi de niveau équivalent à la catégorie C, et qui n’a pas atteint un niveau de formation sanctionné par un diplôme ou un titre professionnel enregistré et classé au niveau V du répertoire national des certifications professionnelles (le CAP relève de ce niveau, ce qui n’est pas le cas du brevet des collèges). Ces dispositions ont pour objectif de leur faciliter l’accès à des formations diplômantes ou certifiantes.
Le CPF, une voie pour accompagner les situations d’inaptitude en cours de carrière
Le fonctionnaire peut bénéficier d’un crédit d’heures supplémentaires lorsque le projet d’évolution professionnelle vise à prévenir une situation d’inaptitude à l’exercice de ses fonctions. Afin d’en bénéficier, l’agent doit présenter un avis formulé par un médecin de prévention attestant que son état de santé, compte tenu de ses conditions de travail, l’expose à un risque d’inaptitude à l’exercice de ses fonctions. Ce crédit d’heures supplémentaires est fixé en fonction du projet d’évolution professionnelle de l’agent, dans la limite de 150 heures en complément des droits acquis et sans préjudice des plafonds mentionnés précédemment. Ainsi, cet abondement d’heures supplémentaires s’ajoute aux droits acquis par l’agent et peut générer un dépassement du plafond applicable (150 h ou 400 h le cas échéant).
Vers un accompagnement personnalisé des agents
Logiquement, les agents bénéficient d’un nouveau droit à un accompagnement personnalisé pour élaborer et mettre en œuvre leur projet via un conseil en évolution professionnelle porté par le centre de gestion pour les collectivités affiliées et l’employeur dans le cas contraire.
S’agissant de construire une mobilité, cet accompagnement fait écho à l’obligation qui incombe aux centres d’assurer un accompagnement individuel de la mobilité des agents hors de leur collectivité ou établissement d’origine. Mais à la différence de cette dernière, elle n’entre pas dans le socle indivisible d’aide à la gestion des ressources humaines ouvertes aux collectivités non affiliées dans le cadre d’une adhésion volontaire.
Un vrai enjeu managérial
La relative déconnexion du CPF du plan de formation adopté par la collectivité invite les employeurs à accompagner leurs agents dans leurs orientations professionnelles presque indépendamment de leur stratégie de court terme. Le CPF constitue ainsi un enjeu managérial qui inscrit pour partie l’employeur dans le projet de son salarié dans le cadre d’un dialogue social renforcé.
Centré sur l’agent, le CPF est l’occasion de repenser le lien entre emploi et compétences, faire de la gestion prévisionnelle, non un objet d’étude ou une méthodologie théoriques, mais une démarche pragmatique dans toute la chaîne hiérarchique locale. Le but du CPF est d’accompagner les agents le plus en amont possible dans leur parcours, anticiper et réorienter, avec une vision large, au-delà de l’espace-temps de l’employeur. Une partie des problèmes d’absentéisme liée à des accidents de travail, maladie professionnelle, longue maladie/longue durée pourrait se trouver à terme, résolue.
Ce faisant, le CPF peut humaniser un biotope parfois très peu propice à un épanouissement professionnel, dans un contexte difficile de réduction des ressources et d’un environnement économique et social sous tension. Une forme complémentaire de prévention des risques psycho sociaux et une anticipation féconde des évolutions du marché du travail territorial.