cnfpt_2011

La formation des agents territoriaux mise en danger au pire moment : l’ADT Inet se mobilise au sein de l’ENTENTE

communiqué de presse de l’ENTENTE

L’ADT Inet a appris avec stupeur et consternation que le projet de Loi de Finances pour 2016 prévoit la baisse de 20 % des recettes du centre national de la fonction publique territoriale au 1er janvier prochain, par l’abaissement du taux de cotisation appliqué aux seuls employeurs publics locaux de 1 % à 0,8 % des salaires bruts versés aux agents territoriaux. Ce nouveau coup porté au fonctionnement des collectivités locales, par ailleurs injustement critiquées sur leur mode de gestion et l’implication de leurs agents, ne va pas dans le sens d’une réaffirmation de l’efficacité du service public.

 

L’ADT Inet a pris connaissance de la motion adoptée à l’unanimité par les membres du Conseil d’Administration du CNFPT, composé à parité d’élus locaux et de représentants des organisations syndicales représentatives de la fonction publique territoriale.

L’ADT Inet s’insurge contre cette mesure massive, brutale, incompréhensible et parfaitement contre performante qui frappe la formation professionnelle des territoriaux sans aucune prise en considération de ses fortes spécificités, au moment où élus et managers locaux sont confrontés, en période de grandes réformes et de difficultés financières, à au moins 6 défis organisationnels majeurs :

  • La nécessité d’assurer la sécurité du travail de 1,9 millions d’agents occupant plus de 250 métiers différents et certains très exposés (dont  par exemple 39.000 sapeurs-pompiers et 20.000 policiers municipaux) en garantissant leurs compétences et en recueillant les habilitations obligatoires, le tout sous la responsabilité pénale des dirigeants, élus et cadres ;

 

  • L’accélération des progrès technologiques, l’augmentation et la diversification des besoins de la population, une exigence de niveau de qualité de service et de réactivité sans cesse en progression, se traduisant par des exigences de gestion répercutées sur les cadres et sur les agents et sollicitant toujours plus leurs compétences professionnelles et la sureté de leurs gestes professionnels (au contact des enfants ou des personnes âgées ou handicapées par exemple) ;

 

  • Le recul des capacités d’expertise des services de l’Etat sur le territoire qui oblige les collectivités territoriales à répondre de plus en plus seules aux besoins impératifs de sécurité technique, juridique, administrative et financière de l’action publique locale  mais aussi des projets des porteurs privés et publics (permis de construire des locaux des entreprises par exemple ) ;

 

  • Le processus d’une ampleur sans précédent de fusions de régions et d’EPCI, de disparition des syndicats intercommunaux ainsi que la conduite des mutualisations engagées entre les communes et les EPCI, dont les pouvoirs publics attendent à tort ou à raison des gains en termes d’effectifs et de productivité, mais qui ne peuvent être obtenus qu’à la condition que les cadres et agents redéployés le soient dans le cadre de parcours d’adaptation et de confortation des qualifications professionnelles et supposant un délai suffisant d’ajustement aux exigences de leur nouveau poste ;

 

  • La baisse des dotations d’Etat qui se traduit par la réduction drastique des recrutements de personnels qualifiés, le non remplacement de personnels partis en retraite et la répartition de leurs missions sur des cadres et agents restants, amenés à acquérir des qualifications élargies pour assurer une charge de travail plus dense ;

 

  • La montée des maladies professionnelles, des phénomènes d’usure professionnelles non exclusivement liées à l’allongement de la durée des carrières et au vieillissement des personnels en fonction, la croissance des risques socio organisationnels, qui obligent les collectivités employeurs, sous l’injonction des médecins du travail, à multiplier les accompagnements individuels et les reconversions professionnelles.

 

Encore faut-il rappeler que le droit à la formation tout au long de la vie a été reconnu par la loi et qu’il convient de l’appliquer. Encore faut-il rappeler que les fonctionnaires territoriaux relèvent de 60.000 employeurs locaux qui n’ont pas tous, loin s’en faut, les moyens d’organiser la formation de leurs collaborateurs. Encore faut-il rappeler que plus de 75 % des agents territoriaux sont des agents de catégorie C qui n’ont pas reçu une formation initiale aussi importante que leurs collègues de catégorie A et B. Encore faut-il rappeler que le CNFPT ne peut pas affecter la totalité de ses recettes à la formation parce qu’il finance aussi d’autres missions fixées par la loi (telles que l’organisation des concours). Voici quelques-unes des spécificités de la FPT qu’il conviendrait de prendre en considération.

Vouloir des collectivités locales qui s’adaptent à marche forcée, vouloir en faire des organisations plus agiles, vouloir les voir demeurer capables, malgré des baisses massives de leurs recettes, de lutter contre les effets des fractures devenues désormais de véritables « crevasses » sociales et territoriales qui menacent les valeurs et les réalités de la République, c’est vouloir disposer sur tout le territoire d’agents publics territoriaux formés, reconnus et motivés.

Le CNFPT, particulièrement depuis la mise en œuvre de son plan national de développement (2011-2015) dont le gouvernement n’attend ni la fin ni l’évaluation pour en briser l’élan, a répondu et répond aux attentes des collectivités locales employeurs et des agents. Les enquêtes et indices de satisfaction le montrent. Les rapports récents de l’inspection générale de l’administration dépendant du ministère de l’Intérieur (mai et juillet 2014) et de la Cour des Comptes (juin 2015) ont reconnu l’augmentation spectaculaire de l’activité de l’établissement et les progrès de sa gestion car l’optimisation de la dépense reste un sujet constant de préoccupation.

 

La baisse de ses recettes de 70 M€, si elle était maintenue à cette hauteur, ne sera pas compensée au sein des collectivités locales sur des budgets alimentés de façon volontaire. Seules les plus grandes collectivités disposent en interne des ressources en ingénierie de formation qui leur permettront de faire face partiellement à la baisse de la capacité d’action du CNFPT. Son rôle péréquateur et mutualisateur, sa capacité de conception et de diffusion de la formation sur l’ensemble du territoire national, sa capacité à connaitre et à s’adapter aux réalités locales sont irremplaçables.

Il n’est pas question de nier la nécessité pour tous les acteurs publics à rechercher et à mettre en œuvre des pistes d’amélioration et des optimisations de gestion. Chacun y est attelé. Mais il est question ici de cohérence de l’action publique locale. La formation est un levier essentiel de la mise en mouvement et de la transformation des organisations.

L’ADT Inet affirme son soutien et sa solidarité aux collègues territoriaux qui œuvrent au sein du CNFPT à la qualité de la formation et au développement de la FPT et qui sont abasourdis et désorientés par la décision annoncée. Elle associe à ce sentiment les quelques centaines d’élus qui siègent dans les instances régionales et nationales du CNFPT et qui consacrent une partie de leur temps et de leur attention à la formation des territoriaux.

A l’aube du débat parlementaire sur le projet de Loi de Finances pour 2016, l’ADT Inet appelle le gouvernement à reconsidérer sa décision et les parlementaires à faire valoir leur connaissance fine des réalités territoriales pour rejeter cette décision sans fondement et aux effets contraires aux objectifs escomptés.