On doit le  Grand Livre du Management Public à Annie Bartoli et Cécile Blatrix. (éditions Dunod)/ Ouvrage labellisé par la FNEGE (Fondation Nationale pour l’Enseignement de la Gestion des Entreprises)

Le titre de l’ouvrage reflète bien le vaste périmètre embrassé par les auteures. Au cœur du fonctionnement des organismes publics, le récit nous embarque sur les origines du management public évoluant au gré des phases de construction de l’administration française, elle-même oscillant du centralisme jacobin à l’organisation décentralisée de la République. Toutes ces phases historiques nous sont détaillées. Dans ce voyage, sous forme de jalons, figurent les approches des théoriciens du management public (Max Weber, Michel Crozier, Henri Fayol) dans toutes les dimensions « productivistes », sociologiques et humaines.

L’emploi public est protéiforme et l’ouvrage le décortique.  En témoigne la diversité des statuts qui ont pris forme après-guerre et la multiplicité des « entreprises » publiques. Mais l’essentiel réside dans la finalité de l’action publique au bénéfice des citoyens.  Une action publique qui doit relever régulièrement de nouveaux défis selon les contextes socio-économiques géopolitiques technologiques et juridiques. L’ouvrage illustre bien les passages du tout Etat dans les phases de reconstruction à l’État régulateur progressivement dépassé du fait de la globalisation par de puissantes logiques capitalistiques.

C’est dans ce cadre mouvant que les questions de performance, de qualité et d’efficacité de l’action publique  se sont imposées et ont donné lieu à différentes méthodes de « production » de service qui nous sont présentées. De la rationalisation des choix budgétaires à la révision générale des politiques publiques sur fond de concept de « valeur ajoutée », les organisations ont évolué avec des méthodes centrées sur une approche quantitative de maîtrise de la dépense, parfois enrichis de réflexions plus empruntes de gestion des ressources humaines. S’ensuivent les techniques d’évaluation, assorties d’études d’impact et de contrôle de gestion qui restent  des éléments clés dans la conduite des organisations.

Les profondes transformations du monde contemporain obligent l’administration publique, dans toutes ses composantes étatique et locale, à reconsidérer son mode d’intervention. Les dimensions phares sur le plan managérial dans un contexte d’incertitude constant sont ancrées sur la notion de sens, de stratégie en tentant d’échapper aux structurations hiérarchiques trop rigides et en redonnant une place aux collaborateurs dans les processus de décision. La réintroduction des valeurs de service public (à l’instar des entreprises « à mission »), des enjeux stratégiques au regard des questions de santé et d’environnement notamment modifie la lecture des services publics. Le recentrage sur les territoires, véritable zone d’action au plus près des besoins des citoyens, devient une nécessité.

L’ouvrage donne des pistes pour faire face aux nouveaux enjeux de transformation de la société. À titre d’exemple, pour piloter les transitions et notamment faire face à l’urgence écologique, comment ne pas imaginer une meilleure coopération des acteurs sous forme de coopétition, d’hybridation de l’action publique dans un rapprochement de la sphère publique et de la sphère privée ?

Comment donc passer à côté de cet ouvrage qui constitue l’un des piliers de la culture managériale des cadres de la fonction publique !

 

Annie Bartoli, professeure de sciences de gestion et du management à l’Institut Supérieur de Management ISM-IAE de l’Université de Versailles St Quentin/ Paris Saclay où elle dirige le Laboratoire de Recherche en Management, le Larequoi et Visiting research professor à Georgetown University. A noter le partenariat historique du Larequoi tissé avec l’ADT Inet qui a conduit à l’organisation de plusieurs symposium, le dernier en date consacré à  la responsabilité sociale des organisations publiques, le prochain (le 23 mai 2022) étant consacré aux enjeux du concept d’une seule santé dans la conception et la mise en œuvre des politiques publiques au cœur des territoires.

Cécile Blatrix est professeur de sciences politiques à Agro ParisTech – université Paris Saclay. Elle est membre du Laboratoire Printemps (professions, institutions, temporalités).