Dit comme cela, une telle affirmation peut vite apparaître comme au mieux naïve, après tout s’il suffisait d’être bienveillant avec ses collaborateurs pour produire un service public plus efficace cela se saurait, au pire, on est très vite classé dans la catégorie des managers manipulateurs, paternalistes ; parfois on laisse aussi entendre qu’une collectivité territoriale n’est pas un cabinet de psychologue et que les managers ne sont pas là pour psychanalyser leurs collaborateurs, qui ne vont pas bien !
Toutes ces remarques doivent être entendues, prises en considération, pour autant, notre responsabilité de manager territorial dans les transformations de l’action publique qui sont en cours, reste bien d’accompagner nos équipes, et nous-mêmes, car il ne faut jamais oublier d’être aussi bienveillant avec soi.
Car c’est bien le point de départ d’une réflexion sur le management bienveillant, pourquoi maintenant, alors que nos organisations ont déjà été capables de s’adapter sans recourir à des approches de cette nature?
Eh bien c’est tout simplement que notre société a changé, que nous sommes de plus en plus confrontés dans l’accomplissement de nos missions à de très hauts degrés d’incertitudes, de niveau de complexité, de vulnérabilité, la pérennité de nos organisations est même posée, cf les fusions, mutualisations de collectivités qui voient disparaître des postes, des services et enfin les nouvelles technologies de l’information et de la communication, ont profondément modifié notre rapport au temps.
Et tout cela produit du stress, en forte augmentation dans le secteur privé, mais aussi dans le secteur public. Et le stress est la première cause de démotivation et de désengagement.
C’est pour cela qu’il est indispensable de mettre en place dans nos organisations, des pratiques managériales qui préservent et restaurent les facteurs de bonne santé au travail, car les fonctionnaires sont comme les salariés du privé, leur engagement dans l’accomplissement de leurs missions va dépendre de facteurs de motivation extrinsèques (conditions matérielles), mais aussi et surtout de facteurs de motivation intrinsèques, qui vont dépendre de leur degré d’autonomie dans le travail, de la prise en considération de leur personne, du respect de leur dignité, du sens qu’ils vont donner à leur travail, de la capacité des managers à reconnaître leur contribution aux projets de la collectivité, non pas dans une approche paternaliste, pseudo affective, voire de petits arrangements, mais dans une vision de responsabilité et d’engagement.
Et comme en France, toute nouvelle idée doit d’abord être validée scientifiquement avant de pouvoir être déployée et intégrée dans les pratiques, je vous invite à lire l’ouvrage coécrit par le Docteur Philippe RODET, médecin urgentiste « le management bienveillant, la bienveillance est l’indicateur d’un monde encore humain », véritable plaidoyer pour inviter les managers à se tourner vers des pratiques de bienveillance et d’auto-bienveillance et la bonne nouvelle du Docteur RODET, c’est que cela s’apprend, se cultive et se propage, dès que l’on commence à le développer, même à de petites échelles. Le Docteur RODET parle de ces bienveilleurs, une dénomination venue du Québec, comme des personnes au sein de l’organisation en capacité de détecter les signaux faibles de collègues qui se ne vont pas bien et d’alerter, soit en les aidant directement, soit en sollicitant les intervenants en capacité d’agir, il en va de la préservation de la santé des personnes.
D’autres courants alimentent depuis quelques années ces pratiques de management bienveillant, qu’il s’agisse par exemple de la psychologie positive, développée aux Etats-Unis par de grands professeurs de psychologie, Martin SELIGMAN, notamment ou en France, avec par exemple Jacques LECOMTE, qui intervient régulièrement en entreprise et qui a écrit un ouvrage sur les entreprises humanistes.
Parfois ces approches vont plus loin, elles sont articulées avec les recherches en neurosciences pour porter de nouvelles pratiques de leadership responsables et altruistes, qui intègrent également des approches plus spirituelles, comme la Méditation de Pleine Conscience, dont les pratiquants sont nombreux à reconnaître les bienfaits sur leurs pratiques managériales.
Outre les engagements pris par certains dirigeants, de grandes écoles de management s’inscrivent dans ces démarches d’un management par la bienveillance, garant d’un écosystème qui préserve l’humain sans entamer la performance des organisations. On peut citer la Chaire Mindfulness, bien-être au travail et Paix économique, dirigée par Dominique STEILER au sein de GEM (Grenoble Ecole de Management).
Il y a quelques jours, le Docteur RODET est venu faire une Conférence à NICE à l’invitation de l’Ecole des Cadres de la Métropole de NICE, devant un parterre de près d’une centaine de cadres territoriaux, en présence du 1er Adjoint et du DGAS Ressources Humaines. Il est venu rappeler les grands principes du management par la bienveillance et ses bénéfices sur le bien-être des personnes quelle que soit leur fonction au sein de la collectivité.
Ce message doit encore essaimer. Il peut l’être si les dirigeants territoriaux s’y intéressent et s’ils font de la place au sein des DRH pour promouvoir les outils et pratiques d’un management bienveillant comme réponse aux enjeux du management public territorial