Les serious games, « jeux sérieux », nous invitent à apprendre, à développer notre créativité tout en s’amusant. Souvent utilisés par les collectivités ou les entreprises pour sensibiliser leur personnel aux grands enjeux sociétaux (le développement durable, le handicap…), ces jeux connaissent aujourd’hui d’autres utilisations notamment en gestion des ressources humaines pour accompagner les recrutements de nouveaux candidats. Il est dès lors légitime de s’interroger sur le bénéfice attendu pour les organisations (publique ou privée) qui se lancent dans ses nouvelles pratiques professionnelles.

Retour vers le passé !

Les serious games sont des jeux vidéos dans lequel le joueur sous la forme d’un personnage (appelé avatar) évolue dans le jeu en suivant un scénario pré-établi. Ces jeux sont issus du monde des jeux vidéos qui a vu le jour dans les années 70 avec notamment Pong et le célèbre pack man. Si cette dimension ludique est toujours présente, les jeux évoluent et son industrie touche aujourd’hui des sphères très différentes. Economique : l’industrie du jeu vidéo pèse des milliards, Social : les serious games forment des écoliers, assistent des médecins, et Culturel avec le phénomène de « gamification »(1)

Une image attractive

Ces jeux sérieux sont des outils innovants, très utilisés par les jeunes générations et en phase avec les évolutions technologiques attendus pour mieux échanger avec les citoyens. En s’appropriant ces outils, la collectivité joue la marque. Elle se donne une image neuve, attractive, innovante et en phase avec les préoccupations de son époque. Quelques initiatives : la ville d’Angers avec 3DAngers lancé en 2010, la Communauté de Cergy Pontoise qui a développé un jeu sérieux sur le développement durable pour les citoyens avec un double objectif : la sensibilisation des joueurs aux comportements citoyens et la mise en oeuvre partagée des actions de la communauté d’agglomération (2)…

Faciliter l’apprentissage des agents

Autre vertu des « serious games » : ils facilitent l’apprentissage grâce à leur aspect ludique, à la notion de plaisir du jeu et au rôle désinhibiteur joué par le personnage fictif qu’est l’avatar. C’est d’autant plus vrai pour des publics éloignés des formes d’apprentissage classiques et peu enclins à se former. A noter, l’initiative de l’INSET de Dunkerque (institut de formation du CNFPT) et la création du jeu sérieux  » France 2087″ dont l’objectif est une sensibilisation aux quatre piliers du développement durable des agents (catégorie C, agents nouvellement recrutés). Dans la même logique, le cnam (conservatoire national des arts et métiers) propose lui aussi une palette de jeu sérieux sur les grandes questions sociétales qui traversent le monde du travail.

Mieux recruter

Et enfin, ce qui intéressent les employeurs et les professionnels du recrutement c’est la possibilité offerte par les serious games d’optimiser la sélection des candidats et de s’assurer d’un recrutement non-discriminant. Cette mise en situation virtuelle est une simulation plus aboutie que le simple entretien, et permet de mieux prendre en compte les prises d’initiative, l’aptitude du candidat à s’adapter à un environnement complexe et de repérer les profils les plus adaptés à la sphère professionnelle du recruteur. L’utilisation de l’avatar comme pare-feu aide à diminuer le caractère discriminant du recrutement. A noter, l’étude publiée en 2014 d’Isabelle Galois-Faurie, et d’Alain Lacroux sur les enjeux de recherche en gestion des ressources humaines que suscite l’utilisation de serious games pour le recrutement.(3)

Le jeu sérieux ne se suffit pas à lui même et représente un coût

Les serious games ne se suffisent pas à eux-mêmes, et sont à insérer dans une palette d’outils pédagogiques avec un accompagnement humain. Un autre frein au développement de ces jeux sérieux est son coût : il est indispensable de soigner le jeu en tant que jeu, ce qui implique souvent de passer par une société spécialisée dans la conception de jeux spécialisés.

(1) exposition Ultima : une exploration du jeu video par Pierre Giner

(2) Serious games, l’exemple de Cergy Pontoise, Fondation Jean-Jaurès / Observatoire de l’innovation locale – 02/07/14

(3) Isabelle Galois-Faurie, Alain Lacroux, « serious games » et recrutement : quels enjeux de recherche en gestion des ressources humaines ?@GRH2014/1(n°10), P11-35. DOI10.3917/grh.141.0011